Dorothée Mouzimann  » La Femme que je voulais devenir « 

Elle nous livre un témoignage poignant et une leçon de vie, remplis d’espoir, qui inspirent à la fois le respect et la réflexion.

La jeune femme, gérante du restaurant Burger’N’Co, rue Saint-Antoine, en centre-ville de Nîmes, a découvert il y a seulement 2 ans qu’elle était « multi-dys ». Dyscalculique, dyslexique, dysorthographie… Des troubles cognitifs qui l’empêchent d’écrire, de lire, de compter  et qui n’ont jamais été détectés lors de sa scolarité. « Les enseignants ont décrété que j’étais un cancre que je ne voulais rien faire. Mais lorsqu’ils me donnaient un devoir, c’est comme si cela était du chinois pour moi«  confie Dorothée qui fut placée, dès la sixième, dans un institut accueillant des enfants autistes.

Dans cette structure, la fillette se renferme sur elle-même et perd le peu de confiance qu’elle a en elle. Deux ans plus tard, elle entame une formation de CAP de vendeuse « j’y suis restée 1 mois car ils ont estimé que je n’avais pas les capacités pour continuer« , poursuit la jeune femme.

Sans diplôme, à 16 ans, Dorothée Mouzimann ne va donc par enfoncer mais « défoncer les portes pour faire découvrir mon intelligence, aux autres et à moi« . Elle va enchaîner les petits boulots de vendeuse. « J’étais très dégourdie, très douée pour la vente mais je ne pouvais pas encaisser à cause de la dyscalculie«  se souvient-elle.

Puis elle va rencontrer celui qui deviendra son mari. Elle trouve le soutien et des amis dans le monde punk  » des gens ouverts d’esprit, qui ne portent aucun jugement sur les autres, qui sont à l’écoute« . Ses nouveaux amis lui redonnent confiance en elle. La jeune femme commence à s’épanouir.

Avec son époux ils ont une petite fille, Charlotte. Lorsque l’enfant a deux ans, Dorothée décide de retravailler. Elle devient serveuse au Burger’N’Co de Montpellier. Sa rencontre avec le patron de ce restaurant jouera un rôle décisif dans la suite de son parcours. La jeune femme va se révéler. « Un jour, je lui ai dit que je voulais ouvrir un Burger’N’Co rien que pour moi. Il n’a pas hésité une seconde. Il m’a donné les clefs en sachant qui j’étais. »

Aujourd’hui, son restaurant ne désemplit pas. Elle dirige deux salariés en hiver et quatre en été. Depuis 3 ans, elle ne déplore aucun arrêt de travail ni retard. « J’ai développé, à cause de mes troubles, une grande psychologie humaine. Je sais détecter très rapidement une tension, un malaise, ou un mal être. Mes employés le savent, ils sont une seconde famille pour moi et je le suis pour eux. Je sais faire preuve d’autorité lorsqu’il le faut, mais toujours avec humanité et je pense qu’ils ont heureux dans leur travail« .

Quand à Dorothée, elle a découvert « ses problèmes » comme elle dit, (car elle refuse de parler de handicap) grâce à sa fille, il y a deux ans. Charlotte a été diagnostiquée « multi-dys » et sa maman a pu enfin mettre des mots sur ses « problèmes« . « J‘ai tout compris lors de l’entretien avec la psychologue. Ma fille et moi, nous sommes pareilles. Sauf que ma fille a la chance d’être suivie par une orthophoniste, qu’elle fait de gros progrès et qu’elle est bien encadrée à l’école. Les choses ont beaucoup évolué entre mon époque et la sienne« .

Dorothée Mouzimann, gérante d’un restaurant, la tête pleine de projets, terminera l’entretien en prononçant ces mots:

« Dans la tête des gens il faut un diplôme pour être quelqu’un. Moi, je me suis accrochée au plus beau diplôme, c’est la femme que je voulais devenir« .

 

Interview et article rédigé par Marie Laure Guerrier . GML Prod .